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Quelles alternatives à la biopiraterie ?

24.02.2014

Agir mais aussi proposer des alternatives. France Libertés se veut force de propositions pour mettre un terme à la biopiraterie. Il existe en effet des solutions adaptées pour protéger, valoriser et défendre les droits des peuples autochtones sur leurs savoirs issus de la biodiversité.

  • Dénoncer les brevets illégitimes

Comme dans le cas du Sacha Inchi ou du Neem, cette dénonciation peut passer par la coordination d’actions médiatiques et juridiques dénonçant des brevets illégitimes sur des supposées « inventions », issues en fait de savoirs autochtones traditionnels sur la biodiversité.

Cette dénonciation s’avère possible grâce à un travail de veille, afin de repérer les pratiques dites de « greenwashing »; c’est-à-dire le fait pour une entreprise de se prévaloir de pratiques respectueuses de l’environnement et des savoirs autochtones, alors qu’en réalité elle s’octroie des monopoles illégitimes via des actes de biopiraterie.

Pour dénoncer ces pratiques, France Libertés envisage son action comme un « Observatoire sur la biopiraterie », via la création d’outils transversaux, dont la constitution d’une base de données de cas historiques, avérés et potentiels de biopiraterie dans le monde.

La base de données constitue un document de référence pour l’élargissement des possibilités de plaidoyer et d’actions du Collectif. Cette veille a vocation à s’enrichir au contact de nos réseaux de partenaires :  Commission nationale péruvienne contre la Biopiraterie, Déclaration de Berne, African Center for Biosafety etc.

La contestation collective de brevets jugés illégitimes et les possibilités de coopération entre les différentes organisations partenaires sont nombreuses. Un certain nombre d’actions a été entrepris avec les partenaires de France Libertés, comme pour le Sacha Inchi, où la coordination d’actions juridiques et médiatiques entre le Pérou et la France a permis que soit abandonné le brevet déposé par l’entreprise Greentech.

  • Veiller à la mise en place de régimes juridiques protecteurs

Ce volet plus juridique passe par plusieurs pistes, au sein de différentes instances nationales et internationales créatrices de droits en lien avec la problématique transversale de la Biopiraterie :

– La création d’un Groupe intergouvernemental d’experts sur la Biodiversité à l’image du GIEC sur le Climat, mis en place en 1988 par les Nations Unies.

– À l’Organisation Mondiale du Commerce : amendement de l’accord ADPIC régissant les règles de propriété intellectuelle à l’international. Le but serait de faire évoluer l’article 27.3 b) relatif à la possible exclusion de la brevetabilité du vivant, afin de mieux prendre en compte la biopiraterie.

– Au sein de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle et de l’Institut National de la Propriété Industrielle : renforcement des règles d’obtention des brevets, notamment au regard des critères de nouveauté et d’inventivité. France Libertés participe régulièrement aux sessions du Comité intergouvernemental de l’OMPI sur la propriété intellectuelle relative aux ressources génétiques, aux savoirs traditionnels et au folklore.

– Quant à la Convention sur la Diversité Biologique, la Fondation a participé à la Conférence des Parties ayant abouti à l’adoption du Protocole de Nagoya en 2010 : celui-ci prévoit que les Etats doivent mettre en place des régimes APA, d’Accès et de partage des avantages tirés de la biodiversité. Ces régimes protégeraient des abus de biopiraterie mais tout dépendra de leur mise en application, ce à quoi France Libertés va rester attentive ces prochaines années…

– En France, beaucoup d’actions sont à entreprendre pour se donner les moyens de condamner la Biopiraterie. Suite à la signature de la Convention sur la Diversité Biologique et du Protocole de Nagoya très récemment, il faut que le régime d’APA soit réellement mis en application. Pour cela, la France doit déjà ratifier la Convention 169 de l’Organisation Internationale du Travail sur les peuples indigènes et appliquer les principes issus de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.

  • Mettre en avant des modèles vertueux

C’est-à-dire maintenir les consciences éveillées, des gouvernements par exemple, afin qu’ils adoptent des régimes juridiques permettant de condamner les pratiques biopirates. Mais cette promotion passe aussi par des campagnes de sensibilisation à l’existence de la Biopiraterie, en soulignant les liens étroits avec la protection de l’environnement et la défense de la diversité culturelle.

Cette sensibilisation vise à impliquer davantage les représentants de l’Etat et de la société civile pour mener une lutte concrète contre la Biopiraterie, améliorer la qualité de l’échange entre les cultures et responsabiliser les acteurs économiques.

Ces initiatives peuvent ainsi favoriser des alternatives de commercialisation permettant d’éviter le dépôt de brevet : il existe déjà des exemples d’entreprises ayant adopté des systèmes alternatifs de protection des peuples et de leurs savoirs(Aïny/Savoirs des peuples ; Guayapi Tropical…)

Ces modèles vertueux doivent être issus de la consultation des populations autochtones et s’appuyer sur les organisations locales afin que les populations autochtones soient réellement impliquées (ex: AIDESEP, CONAIE…). Des pratiques pionnières sont déjà observées au Pérou, en Afrique du Sud, en Equateur ou encore en  Inde, où fut créée une  base de données des savoirs traditionnels en partenariat avec les offices des brevets.