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Calais éclaire la déroute de nos politiques migratoires

Le 1er février, une partie de Calais a été le théâtre de rixes entre migrants. L’analyse de ces événements terribles ne peut pas faire l’économie d’un regard très critique de la politique migratoire mise en œuvre par notre pays.

Les migrants qui veulent se rendre en Angleterre tentent seulement d’accéder à une vie digne. A force de maltraitances, n’avons-nous pas nous-mêmes créé les conditions de la violence ? J’aimerais que le Ministre de l’Intérieur se pose cette question plutôt que de condamner systématiquement les migrants.

Nous nous enlisons dans des politiques répressives et nous perdons de vue l’essentiel : notre devoir d’humanité. Nous multiplions les murs: à Calais et en Afrique du Nord. Nous construisons des murs administratifs dans les pays d’origine des migrants en conditionnant notre aide au développement à la lutte contre les départs vers l’Europe.

Comment ne pas s’interroger sur nos propres dérives alors que des femmes et des hommes au pouvoir dans notre pays ont le souvenir de la chute du mur de Berlin et de l’euphorie qui a submergé l’Europe et le Monde comme un souffle de paix et d’humanité ? Nos murs ne sont pas destinés à changer le monde.  Ils ne sont que le symbole des inégalités croissantes entre des pays qui pillent la planète à leur profit, et des milliards de citoyens exclus de cette richesse.

« Nous ne pouvons pas attendre que tout s’écroule »

Le monde est aujourd’hui connecté, chaque citoyen peut le regarder sous toutes ses facettes : en transformation, en guerre, en proie aux changements climatiques. Chacun peut s’apercevoir que les inégalités sont le cœur même des déséquilibres qui construisent l’instabilité de notre époque. Même le Fond Monétaire International s’en inquiète.

Nous ne pouvons pas attendre que tout s’écroule. Nous avons le devoir de proposer une nouvelle voie, construite collectivement, et c’est dans ce sens que de nombreuses associations appellent depuis des années à la tenue de conférences internationales des migrations. Nous sommes capables de proposer de nouvelles politiques de paix. Nos États doivent se parler et co-construire ces nouvelles politiques. Ils ont accepté d’ouvrir le dialogue pour lutter contre le changement climatique mais le refusent pour définir les nouvelles politiques migratoires, alors que ces deux enjeux sont plus que jamais étroitement liés.

Pousser les États à ouvrir le dialogue

Devant le silence et le refus de dialogue de l’État français, plus de 500 organisations de toute la France portent actuellement l’organisation des états généraux des migrations. Elles proposeront des politiques alternatives résolument humanistes et qui permettront de déconstruire la violence actuellement à l’œuvre.

Le Président de la République a plus que jamais le devoir de mettre notre pays sur un nouveau chemin, un chemin qui prenne en compte la richesse de nos cultures plurielles, qui s’appuie sur nos différences, qui s’enrichisse de nos regards divers sur le monde pour définir un nouveau paradigme du vivre ensemble.

Emmanuel Poilane, Directeur de France-Libertés et Président du CRID.