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Le cri des indiens Guarani-Kaiowa du Brésil face à la déforestation

24.07.2015


guarani-kaiowa_-_marion_veber_-_amazonie.jpgDe gauche à droite :
Marion Veber, chargé du programme « droit des peuples » à France Libertés,
Gert-Peter Bruch, Président de l’association Planète Amazone,
Valdelice Veron, Porte-parole du peuple des Guarani Kaiowá, et
Natanael Vilharva-Cáceres, leader indigène du peuple des Guarani Kaiowá

Conférence de presse
organisée par Planète Amazone

Mercredi 22 juillet 2015

Voici le témoignage de Valdelice Veron, lu au Sommet des Consciences le 21 juillet 2015 :

« Je suis une indigène fière d’appartenir à l’ethnie Kaiowá. Je suis la fille du cacique Marcos Verón, assassiné en 2003, comme 289 autres personnes de mon peuple qui ont été massacrées par les grands propriétaires fonciers pendant la dernière décennie : des enfants, des femmes, des personnes âgées et des hommes dans la fleur de l’âge. Moi-même, je suis menacée. J’agis en défense du tekoha, c’est-à-dire du mode de vie traditionnel de mon peuple guarani.

Je me bats contre le génocide et l’ethnocide pratiqués au Brésil depuis l’arrivée des colonisateurs au 16e siècle. J’ai besoin d’aide ! Mon peuple crie au secours ! Je ne suis que la porte-parole d’un peuple qui refuse de mourir en silence ! Notre seul désir est de vivre en paix sur la terre où nous sommes nés, où sont enterrés nos ancêtres.

Je suis une gardienne des forêts dont la seule ambition est d’assurer à ses enfants le « Testament vert », synonyme de préservation de la nature. La relation respectueuse de mon peuple envers la terre, la faune et la flore est une simple expression du mode de vie Kaiowá. Nos territoires sont en train d’être détruits par des hommes avides dont le seul but est de s’enrichir en approvisionnant le marché international de soja, de viande… En ce qui nous concerne, le fléau est l’agro-carburant : l’éthanol est fait du sang qui jaillit de nos veines et inonde la terre Kaiowá.

Nous exigeons également la stricte application par les pays signataires de la Convention des Nations Unies contre la Corruption. Cette pratique est à la base de l’exportation illégale de bois, en d’autres termes, d’une usurpation criminelle qui mène les populations autochtones à une calamité.

Au cours de leurs voyages autour du monde, les caciques Raoni et Megaron ont pris conscience que les problèmes auxquels ils sont confrontés sont similaires à ceux de presque tous les peuples autochtones du monde. Agissant ensemble avec d’autres chefs traditionnels et aussi quelques alliés, ils vont lancer officiellement lors de la COP 21 l’Alliance des gardiens de la Mère Nature qui est, pour moi et pour tous ceux qui ont adhéré à cette initiative, un chemin d’espérance. Voici où s’intègre notre résistance aux maux qui détruisent l’environnement dont dépend notre survie.

Je suis ici pour réclamer des lois internationales réellement contraignantes avant la construction de nouveaux barrages hydroélectriques géants, des lois qui parviennent à imposer effectivement, avant le début des travaux, comme condition sine qua non, que l’ouvrage soit en conformité avec les recommandations du rapport final de la Commission mondiale des barrages (2000). L’Alliance se battra pour le démantèlement des grands barrages qui ont été construits en violation du droit à la consultation préalable des peuples autochtones affectés, tel que stipulé dans la Convention 169 de l’OIT.

Enfin, je demande aux instances internationales la reconnaissance de la notion de crime contre les générations futures, notion qui devrait définir l’écocide, c’est-à-dire, le crime de destruction partielle ou totale des écosystèmes d’un territoire spécifique. Une telle mesure peut débuter par le changement du Statut de Rome, modification que n’importe quel chef de l’Etat peut proposer.

Le monde est à la croisée des chemins. Les droits ancestraux des Indiens du Brésil, reconnus par la Constitution brésilienne, sont en danger. Nos soutenabilités culturelle, économique et sociale dépendent de Terre et Vie. La Terre-Mère a aussi besoin de ses gardiens, elle a besoin du peuple originaire puisque celui-ci n’a pas succombé entre les mains de la cupidité et du progrès illusoire. Nous devons nous unir les uns les autres, guidés par ces gardiens qui nous ramènent à terre. C’est seulement ainsi que nous pouvons conquérir notre avenir, ensemble avec tous les peuples qui se battent pour que la planète puisse encore respirer. »

Pour en savoir plus, lire l’article du Monde « Valdelice Veron, la porte-parole des Guarani-Kaiowa accuse le Brésil d’« écocide » », celui de Goodplanet « Amazonie: face à la déforestation, le cri d’alarme des Guarani-Kaiowa », ou écouter le débat sur France inter « La déforestation ne décime pas que les arbres ».