Go to the main content

Le Bien-Vivre s’invite à la Fondation France Libertés : rencontre avec José Gualinga

18.10.2010

Le lundi 4 octobre 2010, la Fondation France Libertés a accueilli dans ses murs José Gualinga, représentant du peuple indien Kichwa de Sarayaku en Amazonie équatorienne.

Le bureau de Danielle Mitterrand fut une escale incontournable dans son voyage en France visant à porter le message de son peuple originaire Kichwa de Sarayaku (Amazonie équatorienne) qui lutte depuis plus de 20 ans pour défendre son territoire, sa biodiversité et son patrimoine immatériel, contre l’intrusion des exploitants pétroliers.

José nous a informé de l’avancée de leur projet « Frontière de Vie » qui consiste à planter, sur tout le pourtour de leur territoire (plus de 300 km de long), de vastes cercles d’arbres à fleurs de couleurs. Ces cercles, au fil du temps, deviendront visibles du ciel et marqueront ainsi la présence de l’homme dans la forêt, ainsi que la volonté des peuples autochtones de préserver leurs territoires et de maintenir la forêt intacte. Dans leur langue, cette frontière se nomme «Le Grand Chemin Vivant de Fleurs » et  50 km ont déjà été plantés malgré l’ampleur de la tâche et les nombreux risques d’accidents que cette mission comporte. https://www.frontieredevie.net/fr/projet.htm

Le projet Frontière de Vie a de plus pour vocation de constituer une preuve vivante qu’un développement basé sur une autre vision est possible et profitable à tous.

En effet, le peuple Kichwa de Sarayaku a ceci de commun avec toutes les populations autochtones qu’il aspire à vivre selon le concept du « Bien-Vivre » ou « Sumak Kawsay » en langue quechua. (L’entretien de France Libertés avec le péruvien Hugo Blanco la semaine précédente montre d’ailleurs de manière frappante cette résonance entre les peuples et leur cosmovision : https://fondationdaniellemitterrand.org/La-Fondation-France-Libertes,774.html

Le Sumak kawsay consiste en l’harmonie entre l’être humain et son passé, ses semblables, sa communauté, ses racines culturelles, sa spiritualité mais également entre l’être humain et la nature, dans une perspective intergénérationnelle.

Ce modèle de développement qui leur est propre s’articule autour de 3 notions :

Le « Sumak Allpa » (Territoire, environnement et ressources naturelles) qui est la nécessité de disposer d’une terre fertile, sans destruction ni pollution. Il faut un territoire préservé pour les générations futures, où la vie des écosystèmes se développe en harmonie avec celle de l’Homme.

Le « Runakuna kawsay » (Economie, politique, social, services de base) qui est le système de vie en harmonie permettant de jouir de toutes les ressources naturelles existantes, dans un rapport étroit avec les coutumes et traditions liées au monde animal, végétal, cosmologique et spirituel. Cette l’harmonie de la vie est appliquée à des valeurs collectives entretenues dans leurs relations interpersonnelles, communautaires et avec la Terre, pour faire en sorte que les relations que le peuple lie avec elle maintiennent leur équilibre.

Le « Sacha Runa Yachay » (savoirs, techniques traditionnelles, connaissances ancestrales, éducation indigène, culture) : est l’ensemble des connaissances de l’agro-écosystème naturel, des pratiques des techniques agricoles, de la chasse, la pêche, la médecine naturelle, la cosmogonie et les processus historiques. Il s’agit de développer et de transmettre le savoir et la pratique des connaissances ancestrales, afin de préserver les savoirs traditionnels et assurer le renforcement de l’identité culturelle indigène.

Cette philosophie qui leur est propre a néanmoins une vocation de globalité et fut intégrée en 2008 dans la Constitution équatorienne. Le gouvernement a ainsi lancé le Plan National du Bien-Vivre 2009-2013 qui vise à mettre en application tous les aspects du Sumak Kawsay et à appliquer ces concepts aux changements économiques et sociaux. José Gualinga a cependant déplor é que le Plan National du Bien-Vivre ne profite qu’à une seule partie des citoyens et qu’il s’inscrive uniquement dans une vision nationaliste ne reconnaissant pas la diversité des peuples.

France Libertés s’associe a différent niveaux dans l’application de ce nouveau modèle de développement à nos sociétés modernes, de plus en plus coupées de leur lien vital à la Nature.

Elle soutient tout d’abord sur place la démarche du peuple de Sarayaku, à travers le financement d’un centre médicinal traditionnel Kichwa (Projet Sasi Wasi), lieu consacré à la guérison selon les plantes et techniques traditionnelles ainsi qu’un lieu d’échange et de transmission du savoir traditionnel.

En outre, France Libertés est membre du Forum pour d’Autres Indicateurs de Richesse (FAIR) qui développe, avec le peuple de Sarayaku, de nouveaux indicateurs de richesses en dehors du PIB et sur la base des principes du Bien-Vivre.

Elle continuera sa coopération avec l’association Paroles de Nature et le peuple Kichwa pour la défense de leurs droits et la préservation de leurs modes de vie traditionnels à travers le projet global « Frontière de Vie », qui vise à sensibiliser l’opinion publique mondiale à la nécessité de retrouver le chemin du Bien Vivre pour tous.