Go to the main content

La 9e session du groupe de travail sur l’Accès et le Partage des Avantages de la CDB à Montréal du 10 au 16 juillet 2010

26.07.2010


La dixième réunion de la Conférence des Parties (COP10) à la Convention sur la diversité biologique (CDB) qui se tiendra du 18 au 29 octobre 2010 à Nagoya est une réunion historique, dont l’enjeu central est la définition d’un régime juridique international sur l’accès aux ressources génétiques et aux savoirs traditionnels associés ainsi que le partage des avantages issus de leur utilisation. (APA)
La CDB a mis en place des groupes de travaux rassemblant divers experts chargés d’élaborer un projet de Protocole pour Nagoya. Le groupe de travail sur les APA s’est réuni pour la dernière fois avant la COP10, à Montréal du 10 au 16 juillet 2010.
Plusieurs représentants des peuples autochtones et de défense de leurs droits ont donc rédigé un document de positionnement commun relatif au processus de la CDB, au projet de Protocole et aux droits humains des peuples autochtones.
Il convient ainsi de présenter une partie de leurs préoccupations, de leurs recommandations et les premiers résultats des négociations de Montréal.

1) Préoccupations des peuples autochtones concernant le Projet de Protocole

Le devoir de respect des droits humains des peuples indigènes : Bien que la CDB et son projet de protocole soient vus comme des instruments de droit de l’environnement, ils sont inextricablement liés à des considérations relatives aux droits humains pour les peuples autochtones. Ainsi, toute dépossession ou diminution des droits des peuples autochtones seraient incompatibles avec l’un des objectifs clés de la CDB qui est « le partage juste et équitable des bénéfices découlant de l’utilisation des ressources génétiques. »
.
L’importance de la Déclaration des Nations Unies sur les Droits des Peuples Autochtones (DNUDPA) dans le contexte de la CDB : La Déclaration offre un cadre et un contexte pour interpréter les droits des peuples autochtones. Elle constitue ainsi un repère crucial pour interpréter la CDB et élaborer un projet de Protocole. Il n’en est cependant jamais fait mention dans le texte élaboré par le groupe de travail sur les APA !

Les instruments et engagements en faveur des peuples indigènes ont été pratiquement ignorés.

Le manque de respect de la DNUDPA: Les peuples autochtones ont ainsi demandé aux Etats d’inclure le paragraphe suivant dans le préambule : » Vu l’importance de la DNUDPA en ce qui concerne ce Protocole »

Le projet de Protocole ne prend en compte que les « droits existants » des communautés, or il est reconnu que certains de ces droits ont été éteints de manière illégitime, notamment en matière de dépossession, et ne doivent pas être exclus du champ du Protocole.

Il n’y a aucune garantie de partage juste et équitable des bénéfices : le vocabulaire utilisé dans le projet de Protocole est délibérément large et non contraignant.

Le droit des peuples autochtones à leurs ressources génétiques reste soumis au droit national et ne leur serait donc pas inhérent :
Article 5) 2) e) du projet de Protocole : «  S’il y a lieu, le droit national reconnaît et affirme les droits existants des communautés autochtones et locales aux ressources génétiques… »

Le consentement préalable, libre et éclairé n’est pas respecté : En effet, l’article 5 bis garde entre crochets les expressions « consentement » ou « approbation ». Retenir ce dernier terme, proposé par le Canada et la Nouvelle-Zélande, affaiblirait considérablement le principe majeur de consentement préalable.

Le terme « peuples autochtones » n’est pas utilisé : le projet de protocole utilise l’expression « communautés locales et indigènes ». Cependant le terme « peuple » procure un statut légal particulier et inclus le droit à l’autodétermination qui n’est pas reconnu aux « minorités » ou « communautés ».

Les droits humains doivent prévaloir sur le consensus : A travers le processus décisionnel du consensus auquel les représentants des peuples autochtones ne peuvent prendre part, le projet de Protocole reflète souvent le plus petit dénominateur commun des positions et conduit à des résultats injustes concernant les droits humains des indigènes.

2) Leurs recommandations

Selon les représentants des peuples autochtones, le texte actuel du projet de Protocole n’est donc pas compatible avec la CDB., la Charte des Nations Unies et d’autres règles et standards internationaux. Afin de garantir un Protocole juste et équilibré, il est selon eux impératif que les Parties :

–  Reconnaissent l’importance de la DNUDPA et son application au
Protocole ;

Respectent le consentement libre, préalable et éclairé des peuples autochtones en ce qui concerne l’accès à leurs ressources génétiques et aux savoirs traditionnels, ainsi que
le droit coutumier, les institutions et les procédures communautaires;

Garantissent la conformité avec le consentement et avec les conditions mutuellement convenues conclues avec les peuples autochtones et les communautés locales ;

–  Prévoient des recours et des mécanismes efficaces pour traiter des contentieux et assurer l’accès à la justice pour les peuples autochtones.

Dans le texte de positionnement commun*, les représentants des peuples autochtones ont donc proposé des amendements concrets au projet de Protocole, prenant en compte les principes ci-dessus et corrigeant les lacunes évoquées dans leurs préoccupations.
Le Collectif Biopiraterie, qui sera présent aux négociations de Nagoya en octobre, partage les préoccupations des peuples autochtones et soutient  leurs recommandations.

3) L’issue des discussions du groupe de travail à Montréal

Le texte final de projet de protocole sera probablement publié d’ici peu dans le rapport de cette 9ème session résumée du Groupe de travail sur les APA. Les premières observations rapportent l’élaboration d’un texte rempli de parenthèses et de crochets, notamment sur les points de blocage les plus épineux et les amendements proposés par les représentants des peuples autochtones tels que : la référence à la DNUDPA dans le préambule, le champ d’application du Protocole, la relation entre le protocole et les autres instruments internationaux, les sanctions en cas de non-respect des règles d’APA et bien d’autres encore…
Parmi les délégués et observateurs présents lors de ces négociations, les plus
optimistes ont noté qu’il est encore temps de trouver des solutions créatives, soulignant le fait que les parenthèses et options alternatives dans les dispositions controversées semblent attirer l’attention de manière constructive sur des domaines spécifiques de désaccord.
Les plus pessimistes ont fait remarquer que pour atteindre un Protocole en octobre à Nagoya, ils auraient dû atteindre ce point des négociations un an auparavant…