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25 ans d’Histoire, 1986 – Le Cambodge, un pays qui se reconstruit.

04.08.2011


Au début des années 80, la situation était dramatique : la plupart des membres du corps enseignant avaient été assassinés, les autres se cachaient dans la crainte de subir le même sort et une grande partie des livres avaient été brûlée ou détruite.

Quand les volontaires ont commencé à travailler sur le terrain, les quelques enseignants qui restaient réclamèrent des manuels. Le français était encore une langue répandue en Asie et il était facile pour nous de récupérer de vieux manuels scolaires.

C’est ainsi que lors de voyages réguliers de 1984 à 1986, nous apportions des ouvrages, principalement en mathématiques ou en français. Toutefois, certains sujets restaient tabou : il était hors de question d’envoyer des formateurs pour parler d’histoire.

À partir de 1988, nous avons pu faire venir des enseignants français pour former des professeurs locaux mais, à cette époque-là, les principaux doyens des universités,  nommés par les Khmers, étaient initialement enseignants au collège. La plupart ne se sentaient donc pas compétents pour assurer concrètement et complètement la formation de futurs collègues.

Ils sont venus passer des diplômes français, de la licence au doctorat, avant de revenir au Cambodge participer à la professionnalisation de nouveaux enseignants.

Tout ce système reposait sur la formation par les pairs. L’idée n’a jamais été d’enseigner à la place des cambodgiens, mais de leur donner les moyens de se remettre à niveau et de décider eux-mêmes des programmes et du fonctionnement de l’enseignement.

Dès 1991, nous avons pu travailler à une autre échelle. En effet, le gouvernement avait instauré un système de formation des professeurs des collèges et lycées dans les écoles de pédagogie régionales (EPR). Les responsables de ces écoles nous ont alors demandé d’intervenir pour créer une équipe de formateurs capables de travailler avec les futurs enseignants.

Le programme comportait autant d’éléments de pédagogie que d’information de fond. Ce furent ainsi plus de 400 formateurs et enseignants de lycée dans toutes les disciplines qui ont suivi ce programme d’aide. En parallèle, la même année nous avons équipé une université avec un système électrique fourni par des panneaux solaires. C’était un mécanisme complètement novateur à l’époque mais qui assurait une autonomie énergétique à ces bâtiments.

L’ONU est arrivé au Cambodge en 1992. Automatiquement, les aides internationales et les ONG présentes sur place se sont multipliées. Dans le même temps le gouvernement a choisi de pratiquer une politique d’ouverture dans tous les domaines, y compris intellectuel, et nous avons pu intégrer l’histoire au programme d’aide. France Libertés était encore la seule ONG qui se déplaçait exclusivement à vélo dans un pays où l’essence était encore hors de prix. Cela nous a permis d’établir une vraie relation de proximité avec la population.

Depuis cette année là, et jusqu’à 1997, des missions étaient organisées tous les étés, et regroupaient de 20 à 40 professeurs à chaque fois. Une deuxième série partait aux alentours de février et mars. Les voyages se sont succédés pendant plusieurs années, en 1996 nous avons même fait venir un chanteur de variété française, Pierre Barouh, auteur de quelques chansons très célèbres et connu notamment pour le titre « la bicyclette » ou « Un homme et une femme », une occasion d’enseigner le français autrement. 

De plus, le Cambodge manquait de matériel pédagogique. De 1996 à 1998, les Cambodgiens et les Français ont rédigé des manuels et des guides pour les professeurs, traduits en khmer et publiés à mille ou deux mille exemplaires, tous vendus. Le but n’était pas de reproduire le programme français mais d’aider les enseignants à définir eux-mêmes leurs pédagogies et leur donner les moyens de rédiger ces ouvrages.

Finalement, ce programme de formation au Cambodge a duré jusqu’à l’été 1998. Cette année-là, le ministère cambodgien de l’éducation a organisé un concours pour créer un corps d’inspecteurs de l’éducation au Cambodge. L’ensemble des enseignants qui avaient suivi notre programme ont été reçus. Aujourd’hui encore, il forme une bonne part de ce corps d’inspection.

A partir de 98, France Libertés s’est éloigné de ce chantier, mais les enseignants et les responsables ont voulu continuer ce travail d’entraide et d’échange.

France Libertés est particulièrement fière d’avoir participé à cette initiative qui se poursuit encore aujourd’hui au travers d’une association : « Loire Cambodge ». Elle propose des CD-ROM de formation, et a achevé un chantier cette année autour de cette thématique.