Rio+20: La déclaration de la société civile pour remettre l’eau au cœur des priorités
09.07.2012
Une déclaration de la société civile rédigée lors du Sommet des Peuples à Rio en juin dernier.
France Libertés était présente à la Conférence des Nations Unies sur le Développement Durable Rio+20 du 20 au 22 juin dernier.
Parallèlement, s'est tenu le Sommet des Peuples, sommet alternatif où Peuples et citoyens, leurs réseaux et organisations, dont France Libertés, ont partagé leurs propositions et alternatives face aux dérives de l’économie verte. Dans ce cadre, France Libertés est intervenu sur le droit à l’eau et la lutte contre la biopiraterie.
Pour être entendus, France Libertés a mobilisé, du 15 au 22 juin, lors du Sommet des Peuples, le Pavillon Bleu, où l’ensemble des acteurs de la défense du Droit à l’eau pour tous se sont retrouvés et ont uni leurs forces. Les propositions et stratégies émises lors des ateliers, sessions plénières et activités culturelles autour de différents thèmes liés à l’eau, bien commun (droit à l'eau, gestion de l’eau, extractivisme,…) ont abouti à la rédaction d'une déclaration.
Au travers de la déclaration, la société civile appelle notamment à ce que les gouvernements mettent l’eau au cœur de leurs priorités et appelle à la création d’une Autorité de l’Eau Mondiale.
Déclaration – Pavillon Bleu
Sommet du peuple, Rio de Janeiro, Brésil
21 juin 2012
Nous, mouvements pour la défense de l'eau et de notre mère la Terre rassemblés au Pavillon Bleu dans la Cúpula dos Povos, partageons collectivement l'idée que l'eau est un bien commun, pas une marchandise. Les
eaux pures de la Terre donnent vie à une étonnante diversité d'écosystèmes et de sociétés humaines. Cette idée commune affirme la nécessité d'un rapport équitable et équilibré avec notre mère la Terre qui respecte les lois de nature, maintienne l'intégrité du cycle de l'eau et assure la réalisation de la justice pour tous les habitants de la Terre.
Nous soutenons la Résolution 64/292 de l'ONU sur le droit à l'eau et à l'assainissement, qui est un succès significatif pour nos mouvements, suite à de nombreuses campagnes pour l'adoption de ce droit dans les constitutions nationales.
En solidarité avec les milliers de militants et de mouvements sociaux, nous rejetons collectivement la direction de nos sociétés par les entreprises et leurs propositions de soi-disante "économie verte", qui visent à attribuer un prix à la nature et à l'eau en les marchandisant au prétexte de la durabilité, du développement, de la réduction de la pauvreté et de l'efficacité ; de ce fait monétisant et marchandisant tout ce qui est sacré et nécessaire à la vie sur Terre.
L'"économie verte" est une expression du modèle capitaliste de développement, qui prête peu d'attention aux interconnexions hydrologiques et crée de profondes injustices et des crises économiques, sociales et environnementales, renforçant ainsi la mainmise et la subordination par l'entreprise de nos sociétés et de la nature aux marchés financiers. Ce modèle de développement, qui considère l'eau (et la nature) comme des données économiques, est inapte à fournir l'accès à l'eau et à l'assainissement pour tous et ne peut pas soutenir une économie durable, ce qui à son tour mine une coexistence pacifique entre les humains, les espèces vivantes et les écosystèmes de la Terre.
Nous rejetons le colonialisme et le racisme institutionnalisés et le déni des droits des Peuples Indigènes et des communautés traditionnelles à l'auto-détermination et à la souveraineté alimentaire.
Nous exigeons de nos gouvernements qu'ils éliminent les fausses solutions de l'"économie verte" et qu'ils ne mettent pas l'eau sous la logique du marché et du profit. L'eau, que ce soit pour la boisson ou l'agriculture, doit demeurer dans le domaine public et être démocratiquement gérée par les communautés et/ou les institutions publiques et non pas par les entreprises.
Nous exigeons de nos gouvernements qu'ils défendent les intérêts publics, qu'ils garantissent l'accès à l'assainissement et à une eau propre et salubre pour tous, en quantités qui puissent maintenir la vie et la dignité. Nous appelons tous les gouvernements à reconnaître officiellement le droit à l'eau et à l'hygiène pour tout le peuple dans leurs lois nationales, en conformité avec la résolution 64/292 de l'ONU. Le droit à l'eau doit en particulier être garanti comme une priorité pour les femmes et les enfants, pour les pauvres et les gens vivant dans des conditions déshumanisantes.
Nous appelons à la préservation de l'intégrité du cycle de l'eau dans le cadre de la reconnaissance des droits des écosystèmes et des espèces à exister, à se développer et se reproduire. Nous appelons à la reconnaissance de la Déclaration Universelle des Droits de notre Mère la Terre afin de garantir que la biosphère et ses habitants soient protégés pour la durabilité et l’équilibre écologique.
Nous appelons à une communauté, une solidarité et un renforcement de pouvoir mondiaux passant par la création d'institutions mondiales de l'eau démocratiques telles que des partenariats public-public et des partenariats public-communauté ou la création d'une Autorité de l'Eau Mondiale agissant dans l'intérêt de l'humanité et de la nature.
Nous appelons à la création d'une cour pénale internationale pour le jugement des crimes environnementaux commis par des entreprises, des gouvernements et des institutions.
Nous nous engageons à continuer à constituer des réseaux et de nouvelles alliances sociales, en élargissant et en approfondissant nos liens avec les mouvements sociaux luttant pour la souveraineté alimentaire, un travail digne et les droits des travailleurs, la démocratie et la justice sociale et environnementale. En particulier, nous nous engageons à participer activement aux campagnes sur la justice du climat étant donné que l'eau est un des éléments clés de la vie qui est gravement affecté par le changement climatique.
Etant donné l'expérience collective, la détermination et la large solidarité que nous avons avec les autres mouvements présents ici au Cúpula, vaincre l'"économie verte" et construire de nouveaux modèles de développement en harmonie avec la nature sont effectivement possibles.
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