Cas de biopiraterie Quassia Amara : la défense contestable de l’IRD
21.03.2017
Le 30 novembre 2016, l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD) a répondu aux arguments de notre dossier d’opposition à leur demande de brevet biopirate. Une réponse juridiquement, éthiquement et moralement critiquable qui ne remet absolument pas en cause les fondements de notre opposition, ni sa légitimité.
L’opposition co-déposée par France Libertés, Thomas Burelli et Cyril Costes devant l’Office Européen des brevets portait sur la demande de brevet de l’IRD sur l’utilisation d’une molécule extraite de la plante Quassia Amara (la Simalikalactone E) pour traiter le paludisme. Cette molécule a été identifiée grâce à des enquêtes menées auprès des populations autochtones et locales de Guyane au début des années 2000. Pourtant, seuls les chercheurs scientifiques sont associés au dépôt du brevet.
Notre opposition pointait notamment
– le non-respect du consentement préalable, libre et éclairé des communautés autochtones et locales qui ont partagé leurs remèdes traditionnels avec les chercheurs de l’IRD ;
– l’absence de partage juste équitable des avantages découlant des recherches.
• Dans sa réponse, l’IRD soutient « qu’aucun dispositif légal (…) n’obligeait les chercheurs à mettre en place le Consentement Préalable et Informé ». Il s’agit d’une approche contestable du cadre juridique existant. Les communautés autochtones et locales seraient-elles des catégories de citoyens dont il ne serait pas nécessaire de respecter le consentement dans le cadre de relations contractuelles ?
• En ce qui concerne l’absence de partage des avantages avec les membres des communautés qui ont participé au projet et avec la Région Guyane, l’IRD adopte la même posture légaliste en affirmant que « les incitations aux partages des avantages dans le droit international s’adressent aux États ». Il s’agit là encore d’une vision étriquée. Au travers de multiples textes internationaux et nationaux, les chercheurs sont très fortement encouragés, voire contraints, de respecter les droits des communautés autochtones et locales.
• L’IRD affirme que ses chercheurs « ont essayé de montrer leur gratitude et de rendre hommage aux populations par l’inclusion de remerciements dans les articles scientifiques » : de la gratitude qui ne coûte rien et ne confère évidemment aucun droit aux populations.
Selon Marion Veber, chargée du programme « Droit des peuples » à France Libertés,
« l’Institut de Recherche pour le Développement privilégie clairement une interprétation du cadre légal qui lui permet de s’affranchir du respect des droits des communautés autochtones et locales avec lesquelles ses chercheurs ont pourtant collaboré. Il est temps que les pratiques de l’IRD évoluent vers un plus grand respect des populations locales et autochtones avec lesquelles l’Institut travaille. »
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